Analyser les besoins en formation : 4 questions à vous poser et 5 méthodes pour vous aider à y voir plus clair

Analyser les besoins en formation constitue une étape nécessaire avant d’implémenter tout dispositif pédagogique au sein d'une organisation. Ce n'est pas forcément un processus difficile, mais il prend du temps.
Image mise en avant pour l'article "Comment analyser les besoins en formation" de David Vellut, psychologue, conseiller pédagogique et médiateur scientifique en psychologie.

Table des matières

Analyser les besoins en formation constitue une étape impérative et nécessaire avant d’implémenter tout dispositif pédagogique en entreprise. Afin de poursuivre sur cette lancée, je vous invite à présent à descendre peu à peu ensemble dans le terrier du lapin d’Alice au Pays des Merveilles.

Imaginons que vous soyez le responsable formations au sein de votre entreprise. Un beau jour, votre DRH débarque dans votre bureau en vous demandant de planifier un programme de formation à la gestion des conflits pour vos collaborateurs. Je vous propose ainsi de commencer par vous poser les quatre questions essentielles et fondamentales pour réaliser votre analyse des besoins et attentes en terme de formation au sein de votre entreprise.

Analyser les besoins en formation : 4 questions à vous poser

À ce stade, la demande reste plutôt vague. La méthode qui suit va vous permettre de la clarifier successivement. Elle consiste à vous poser les questions : « Qui fait quoipourquoi et comment ? »((Hougardy, A. & Oger, L. (2006). Une méthode en 4×4 pour l’analyse des besoins et la régulation en FAD. International Journal of Technologies in Higher Education3(1), 40-48.))1.

1. Qui ?

Qui est le public-cible concerné par votre projet de formation ? Quelles sont ses caractéristiques et spécificités ? S’agit-il d’un public relativement homogène ou hétérogène (au niveau de leur sexe, de leur âge, de leurs compétences, de leur position hiérarchique au sein de l’entreprise…) ? Globalement, par rapport à la thématique choisie :

  • Ont-ils déjà suivi des formations préalables sur ce sujet ?
  • Disposent-ils déjà de compétences à ce niveau ?
  • Le projet de formation s’adresse-t-il à l’ensemble des collaborateurs ou seulement à une tranche plus ciblée (top management, middle management…) ?

2. Quoi ?

Il s’agit ici d’identifier les forces, faiblesses, opportunités et menaces présentes dans la formation initiale des collaborateurs ciblés par rapport à cette thématique. Plus fondamentalement, l’objectif de cette étape est aussi d’épingler les désirs/souhaits par rapport à la formation attendue :

  • Quels sont les éléments satisfaisants par rapport à ce qui se fait pour l’instant ?
  • De quoi les collaborateurs sont-ils insatisfaits ?
  • Quelles sont les voies de progrès et améliorations qu’ils estiment nécessaire ?

3. Pourquoi ?

Après avoir analysé les demandes et attentes du public-cible, on en vient progressivement à définir leurs besoins et les besoins concrets exprimés par l’entreprise. Cette étape se réalise en formulant des hypothèses et déductions sur base des demandes et attentes formulées. On peut également prendre le point de vue des priorités : en fonction de leur urgence et/ou importance relative, quels sont les besoins de formation à combler en priorité ?

4. Comment ?

Enfin, on en arrive à définir quelles vont être les grandes orientations du projet de formation et opérationnaliser un plan d’action :

  • Au vu de l’analyse des besoins et attentes, est-il réellement nécessaire de développer ce programme de formation ?
  • D’autres pistes sont-elles à envisager (feedback, coaching, mentoring…) ?
  • L’entreprise a-t-elle les moyens de répondre à cette demande, ou doit-elle passer par un prestataire extérieur ?

Analyser les besoins en formation : un processus à la fois simple et complexe

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, l’analyse des besoins et attentes de formation n’est PAS un processus difficile. Par contre, c’est un processus qui prend du temps, et c’est à ce niveau qu’il revêt une certaine complexité((Brown, J. (2002). Training needs assessment: A must for developing an effective training programPublic Personnel Management31(4), 569-578.)). Dans le meilleur des cas, vous vous en sortirez au bout de quelques jours si le travail a déjà été bien balisé. Mais pour être tout à fait réaliste, le processus prendra vraisemblablement plusieurs semaines (surtout si vous exercez au sein d’une grande organisation).

Aujourd’hui, je vous propose de continuer ce cheminement ensemble en parcourant avec vous cinq méthodes et outils pour vous aider à réaliser cette analyse des besoins et attentes :

1. Utiliser des questionnaires

Que ce soit en format papier ou en format électronique, les questionnaires sont une des méthodes les plus utilisées et les moins coûteuses pour évaluer les besoins et attentes de formation.

Les avantages :

  • Faciles à créer et à diffuser (surtout s’ils sont édités en ligne et envoyés par mail ou via l’Intranet de l’entreprise),
  • Peu coûteux sur un plan financier,
  • Permettent de récolter des données de manière anonyme,
  • Facilité de récolte de données, d’encodage et de visualisation des résultats.

Les inconvénients :

  • Parfois peu propices à l’expression de réponses libres et personnalisées,
  • Requièrent du temps pour les concevoir de manière efficace (choisir les bonnes catégories, formuler de bons items…),
  • Ne permettent souvent pas de mettre le doigt sur les causes des problèmes et solutions possibles.

2. Organiser des focus groups

Les groupes de discussion consistent à rassembler autour d’une table un certain panel de collaborateurs (des managers ou responsables d’équipe, par exemple) afin de réaliser un brainstorming par rapport à une thématique/problématique spécifique.

Les avantages :

  • Permettent une certaine interaction entre personnes et points de vue,
  • L’accent est mis sur le consensus du groupe (ce qui favorise l’engagement),
  • Permettent aux aux membres du groupe de développer leurs compétences d’analyse et de résolution de problème (il s’agit ici déjà en soi d’une activité «formatrice»).

Les inconvénients :

  • Très coûteux en temps pour les membres du groupe et pour la personne chargée de récolter les résultats et de les synthétiser,
  • Les données récoltées sur un plan qualitatif peuvent se révéler parfois difficiles à quantifier.

3. Réaliser des entretiens individuels

Les entretiens individuels peuvent être réalisés de manière structurée ou semi-structurée, sous plusieurs modalités : en face à face, par téléphone ou Skype, ce qui permet une certaine flexibilité au niveau horaires et déplacements.

Les avantages :

  • Par leur caractère plus personnel et intime, ils favorisent la mise en évidence de causes et de solutions à une problématique donnée,
  • Permettent de récolter des données extrêmement riches en informations,
  • Permettent un feedback plus spontané et naturel.

Les inconvénients :

  • Encore plus chronophages que les focus groups,
  • Encore plus difficiles à analyser et à synthétiser,
  • Besoin d’une personne expérimentée à la conduite d’entretiens et à la récolte de données qualitatives.

4. Procéder à une analyse de tâches

L’analyse de tâches peut être réalisée de manière informelle et systématique par le manager, et/ou en collaboration directe avec les RH. Il s’agira ici de bien la distinguer d’une analyse en vue d’obtenir une promotion.

Les avantages :

  • Permettent d’identifier précisément les forces et faiblesses en jeu en termes de compétences,
  • Permettent d’identifier clairement les besoins de développement et de formation des collaborateurs.

Les inconvénients :

  • Coûteuses à développer et à mettre en place,
  • Peuvent permettre aux managers de manipuler les résultats à d’autres fins (de promotion, par exemple),
  • Peuvent invalider les résultats en raison d’un biais lié à l’évaluateur.

5. Effectuer des observations sur le terrain

Les observations peuvent être liées à l’évaluation de compétences techniques ou comportementales. Contrairement aux analyses de tâches, l’observation se déroule ici dans le contexte traditionnel des collaborateurs. L’objectif de l’observateur est donc de se faire le plus discret possible pour ne pas interrompre/perturber les travaux en cours.

Les avantages :

  • Si bien réalisées, elles minimisent les interruptions de travail et/ou de l’activité du groupe,
  • Permettent de produire des données effectives issues du monde réel.

Les inconvénients :

  • Besoin d’un observateur entrainé et compétent,
  • Si l’observateur n’est pas suffisamment discret, elles peuvent donner l’impression aux collaborateurs d’être espionnés.

Malheureusement il n’existe encore aucune méthode miracle pour analyser les besoins en formation

Comme vous pouvez le constater, il n’existe aucune méthode ou outil parfait. Si certains sont peu coûteux (comme les questionnaires), d’autres présentent l’avantage d’être plus effectifs, comme les focus groups ou l’analyse de tâches. Il faudra donc faire votre shopping parmi ces outils et méthodes, en fonction de votre contexte professionnel : quel est le budget dont vous disposez pour analyser les besoins et attentes de formation au sein de votre entreprise ? Quelle est la fourchette de temps mise à votre disposition pour réaliser cette démarche ?…

Voici ce que je vous invite à faire dès maintenant :

  1. Si vous n’avez pas encore procédé à l’analyse des besoins et attentes de formation au sein de votre entreprise, ne vous lancez pas tête baissée dans l’élaboration de votre dispositif pédagogique sans la réaliser au préalable !
  2. En collaboration avec votre DRH, déterminez vos besoins en termes de timing et de budget pour réaliser cette étape.
  3. Choisissez les outils et méthodes les plus appropriés pour récolter les données dont vous avez besoin. Rendez-vous sur le terrain, récoltez… et analysez.
  1. Lebrun, M., Smidts, D. & Bricoult, G. (2011). Comment construire un dispositif de formation. Bruxelles : De Boeck. []
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